Pourquoi certains verbes admettent-ils les objets implicites indéfinis ? Une réponse pragmatique

Publisher: Edp Sciences

E-ISSN: 2261-2424|8|issue|2213-2235

ISSN: 2261-2424

Source: SHS Web of Conferences, Vol.8, Iss.issue, 2014-07, pp. : 2213-2235

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Abstract

Les objets implicites indéfinis – ou OIIs – sont des constituants de sens correspondant sur un plan sémantique à des arguments objet de valeur indéfinie. Ils sont donc paraphrasables par des compléments d'objet direct indéfinis. Cependant, ces constituants sont implicites, au sens où ils n'apparaissent pas dans la forme de surface de l'énoncé. Ainsi, lorsque j'affirme (1), mon énoncé présente les mêmes conditions de vérité que (2) : (1) Marie mange.(2) Marie mange quelque chose.Affirmer que Marie mange, c'est bien affirmer que Marie mange quelque chose. Et comprendre l'énoncé en (1), c'est comprendre qu'il signifie (2). En d'autres termes, (1) met en jeu un OII. Or il semble que parmi les verbes pouvant apparaître avec un complément d'objet direct, tous n'admettent pas l'omission de l'objet et l'interprétation avec un OII. Ainsi, on ne peut pas dire « je suis en train de mettre », au sens de « je suis en train de mettre quelque chose ». Comment expliquer ce contraste entre « manger « et « mettre » ? Plus généralement, comment rendre compte de la distribution des OIIs ? Dans cet article, j'examine tour à tour quatre analyses qui ont été proposées dans la littérature, à savoir l'approche lexicaliste arbitraire, selon laquelle la capacité d'un verbe à admettre les OIIs est déterminée lexicalement mais ne peut être dérivée d'aucun autre trait sémantique du verbe, l'approche lexicaliste aspectuelle, selon laquelle la capacité d'un verbe à admettre les OIIs est déterminée lexicalement, mais peut être dérivée des propriétés aspectuelles du verbe, l'approche lexicaliste événementielle, selon laquelle la capacité d'un verbe à admettre les OIIs est déterminée par la nature de la structure événementielle du verbe, et l'approche constructionniste, selon laquelle les OIIs sont autorisés par des constructions grammaticales spécifiques qui font partie de la connaissance grammaticale des locuteurs compétents. Cependant, je montre qu'aucune d'entre elles ne parvient à rendre compte de manière satisfaisante de la distribution des OIIs. Je défends alors une analyse alternative de nature pragmatique ou communicationnelle, selon laquelle un verbe peut accepter les OIIs si et seulement si, dans le contexte en jeu, il est communicationnellement pertinent de considérer l'action que ce verbe dénote comme une activité en tant que telle, indépendamment de l'argument objet qu'elle reçoit. Selon cette analyse, la capacité d'admettre un OII n'est pas une propriété des « types » de verbes mais des « occurrences » de verbes. Je montre que cette analyse permet de rendre compte adéquatement des données.